Explication linéaire : postambule, déclaration des droits de la femme et de la citoyenne, olympe de gouges

Avec la Révolution française, les citoyens obtiennent des droits mais les citoyennes, qui ont combattu aux côtés des hommes pour l’égalité et la liberté, sont totalement oubliées. A ce titre, en 1791, Olympe de Gouges réécrit la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, rédigée en 1789 et propose une Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne. Oeuvre inclassable, à la fois texte juridique, pamphlet, discours, elle s’adresse à quatre interlocuteurs : la reine Marie-Antoinette, les hommes, l’Assemblée nationale et les femmes. Olympe de Gouges espère influer sur la rédaction de la Constitution qui, en voie d’adoption, exclut les femmes des droits civiques et politiques. Son objectif principal est de permettre aux femmes d’obtenir une reconnaissance légale de leurs droits au sein de la société. Ne pouvant, parce qu’elle est une femme, prendre la parole directement pour s’adresser aux députés, elle dicte à son secrétaire le discours qu’elle ne peut prononcer. L’extrait que nous allons étudier est le début du Postambule. Il vient clore la Déclaration. Dans ce texte qui ressemble à un pamphlet (texte court et virulent qui s’attaque aux institutions ou à une personne), Olympe de Gouges cherche à faire réagir les femmes en leur montrant qu’elles ont trop longtemps accepté leur statut d’esclave et qu’il est temps de se révolter. Ainsi, nous allons nous demander en quoi Olympe de Gouges lance, grâce à ce Postambule, un appel à la révolte. Pour répondre à cette problématique, nous étudierons, dans une première partie l’appel à la révolte des lignes 1 à 6, le constat de l’inégalité de la ligne 6 à 14 et les revendications des droits placées sous le signe de la raison de la ligne 14 à 19. 

I/ Un appel à la révolte (l 1 à 6 : « aveugles ») 

C’est sur l’apostrophe : « Femme » (l 1) et l’impératif : « réveille-toi » que s’ouvre le postambule. Olympe de Gouges cherche à provoquer une réaction chez ses lectrices. Elle les invite, en effet, à ouvrir les yeux sur leur situation et à refuser, désormais, leur servitude. L’allégorie : « le tocsin de la raison » et l’hyperbole : «  se fait entendre dans tout l’univers » (l 1) mettent en exergue le tournant important que le monde est en train de connaître. Parce que cette situation est inédite, la femme doit, plus que jamais, selon Olympe de Gouges, agir. Effectivement, l’écrivaine utilise un deuxième impératif : « reconnais tes droits » (l 1 et 2) et un déterminant possessif : « tes » afin d’encourager les femmes à obtenir ce qui leur est dû. Nous pouvons constater la présence du champ lexical du mensonge et de la bêtise dans les deux phrases suivantes : « préjugés », « fanatisme », « superstition », mensonges. », « sottise », « usurpation ». (l 2, 3 et 4) Ce lexique dépréciatif renvoie à l’Ancien Régime qui proposait une société injuste et obscurantiste. Cependant, la négation partielle : « Le puissant empire de la nature n’est plus environné » et l’utilisation du passé composé indiquent que cette époque appartient au passé. Grâce à la métaphore : « Le flambeau de la vérité » (l 3), Olympe de Gouges proclame le début d’une nouvelle ère qui doit être synonyme de revendications féminines. Nous pouvons également remarquer que cette référence à la vérité est à mettre en lien avec les Lumières. En effet, le but des philosophes du XVIIIème siècle est de lutter contre l’obscurantisme (l’ignorance) en privilégiant la réflexion et la raison. En outre, elle fait appel au champ lexical de l’esclavage : « homme esclave », «  briser ses fers » (l 4 et 5) et montre que l’homme a accédé à la liberté grâce à la femme. Cependant, comme le révèle le parallélisme de construction : « Devenu libre, il est devenu injuste » (l 5), il n’a aucune reconnaissance envers celle qui l’a épaulé. C’est la raison pour laquelle Olympe de Gouges lance cet appel à la révolte. Nous pouvons noter une forme d’écho à la ligne 5 puisque le ô lyrique « Ô femmes ! » semble résonner avec l’apostrophe de la ligne 1 : « Femme, réveille-toi ». Néanmoins, le singulier laisse place au pluriel et l’adresse d’Olympe de Gouges devient universelle. Elle s’adresse à toutes les femmes. L’interrogation directe partielle : « quand cesserez-vous d’être aveugles ? » (l 6) sonne comme une provocation. L’écrivaine met ses auditrices face à leur responsabilité car, pour l’auteure, elles sont en partie responsables de leur statut d’esclaves et préfèrent fermer les yeux plutôt que d’agir.

II/ Le constat de l’inégalité (l 6 à l 13) 

Notre deuxième axe se caractérise par une série de questions / réponses qui crée un dialogue fictif entre Olympe de Gouges et les femmes. L’interrogation partielle : « Quels sont les avantages que vous avez recueillis dans la Révolution ? » (l 6-7) reçoit une réponse dont la brutalité est mise en évidence grâce à un rythme binaire : « Un mépris plus marqué, un dédain plus signalé. » (l 7) La négation exceptive (ou restrictive) : « vous n’avez régné que sur la faiblesse des hommes. » (l 7-8) souligne l’absence de pouvoir des femmes. Par la suite, Olympe de Gouges fait le constat de l’échec de la Révolution française pour les femmes. Le champ lexical du mépris apparaît alors : « empire est détruit », « que vous reste t-il donc ? » « injustices de l’homme » (l 8-9) Mais alors, que faire face à ce mépris ? Pour Olympe de Gouges, les femmes doivent réclamer ce qui leur revient : « la réclamation de votre patrimoine » (l 9) et ont en leur possession des armes efficaces comme le fait que l’égalité est naturelle. Elle évoque, en effet, les « sages décrets de la nature » (l 9-10). L’ironie de l’écrivaine se fait entendre à la ligne 11 lorsqu’elle fait référence à un passage de la Bible : les noces de Cana. Durant ce célèbre épisode, Jésus transforme l’eau en vin. Pourtant, avant ce miracle, il s’adresse à sa mère avec peu de sympathie. Alors qu’elle lui fait remarquer que le vin vient à manquer, il lui répond : « Femme, qu’avons-nous de commun en cette affaire ? » La périphrase : « Le législateur des noces de Cana » (l 11), désigne le Christ et Olympe de Gouges critique ainsi la religion chrétienne qu’elle voie comme légitimant l’inégalité des sexes. Le nom « législateurs » est repris pour nommer l’Assemblée nationale : « Législateurs français » (l 11) qui, comme Jésus, s’adresse avec dédain aux femmes : « femmes, qu’y-a-t-il de commun entre vous et nous ? » Olympe de Gouges suggère une réponses aux femmes : « Tout, auriez-vous à répondre » (l 13) Le pronom « tout » qui se trouve en tête de phrase affirme, proclame l’égalité. 

III/ Des revendications placées sous le signe de la raison (l 14 à 19) 

Dans la dernière partie de cette explication, nous pouvons lire les conseils que l’auteure adresse aux femmes. Grâce à une énumération de verbes à l’impératif : « opposez courageusement la force de la raison … réunissez-vous sous les étendards de la philosophie ; déployez toute l’énergie de votre caractère » (l 15-16), elle met l’accent sur l’importance de la raison et de la philosophie dans ce combat pour l’égalité, des thèmes chers aux Lumières. Elle encourage ses lectrices, également, à argumenter, à défendre leurs idées, à montrer l’injustice de cette supériorité masculine. Le futur : « vous verrez » ainsi que l’adverbe « bientôt » annoncent une victoire prochaine. En faisant preuve de courage et de raison, les femmes feront entendre raison aux hommes. Celles-ci apparaissent comme des combattantes et ce n’est pas un hasard si le champ lexical de la guerre est présent : « force » (l 15), « étendards » (l 16), « serviles adorateurs rampant » (l 17), « barrières » (l 18) Olympe de Gouges termine en insistant sur le fait que l’égalité des sexes est entre les mains des femmes. L’antithèse : « pouvoir / vouloir » et la négation exceptive : « vous n’avez qu’à le vouloir » (l 19) permettent à l’écrivaine de montrer que des changements sont possibles mais qu’ils impliquent un vrai combat de la part des femmes. 

Ce postambule s’ouvre sur une phrase : « Femme, réveille-toi » qui est désormais célèbre. Dans ce texte, Olympe de Gouges cherche à faire réagir les femmes, à leur faire prendre conscience de la manière abjecte avec laquelle les hommes les traitent et rappellent qu’avec un discours argumenté, reposant sur la philosophie et la raison, les revendications féminines seront entendues. Malheureusement, en1793, le député Amer déclare que les femmes sont inaptes à exercer des droits politiques et demande l’interdiction des associations et des sociétés féminines. Il faudra attendre 1944, en France, pour que les femmes obtiennent le droit de vote. 

Laisser un commentaire